On pourrait croire que travailler en librairie permet de côtoyer des gens cultivés, ou du moins ayant des bases littéraires.
Pas toujours !
Cet arrivage de perles vaut son pesant de cacahouètes. Elles sont toutes authentiques et récentes.
(Les parties en italiques ne font pas partie des dialogues)
Le client : Vous n'auriez pas "l'ile aux enfants" de Maringot ?
Pauvre Marivaux et son île des esclaves.
Toujours avec l'île des esclaves, le dialogue suivant était surréaliste :
Le client : L'île aux esclaves, vous avez ?
Moi : Oui, de Marivaux.
Le client : Oh ! vous connaissez ! vous êtes vraiment très fort !
Au moins, ça fait plaisir !
Dans le même esprit :
Lui : Je cherche un livre qui s'appelle Rhinocéros, c'est de.... heu... de....
Moi : Ionesco.
Lui : Ah ! Vous connaissez ! On a déjà dû vous le demander alors !
Ça aussi, ça fait plaisir !!!
Cet autre client, croyant sans doute que son lycéen de fils lui avait fait une bonne blague :
"Je cherche un livre, mais le nom de l'écrivain, ça me semble bizarre. Anouilh, ça existe, ça ?"
Cet autre élève, qui doit faire la fierté de ses professeurs :
Lui : Je veux le livre de Molière.
Moi : Lequel ?
Lui : j'sais pas moi, son dernier, c'est pour l'école !
Celui-là devait confondre ses cours de Français avec ses cours d'économie :
"Vous n'avez pas Down Jones de Voltaire ?"
Pauvre Molière ! Heureusement, tout comme son Don Juan, il a a vu d'autres !
"Bonjour, je cherche le C. I. D. (prononcé : "Céhidé") de Corneille"
(Complexe d'Illettrisme Définitif ?)
Le client : Je voudrais le médecin de Molière
Moi : Oui, le médecin malgré lui ou le médecin volant ?
Le client : Lequel c'est qu'vous vendez le plus ?
Moi : Le médecin malgré lui.
(Inutile de lui demander la collection, le pauvre avait suffisamment l'air embrouillé comme ça)
Le lendemain, voilà qu'il revient, furieux, avec dans les mains un livre qu'il avait déchiqueté de rage :
"Vous vous êtes bien moqué de moi hier ! Mon fils s'est fait punir, vous m'avez vendu le mauvais livre ! C'était "le malade imaginaire qu'il lui fallait !"
Celle là est vraiment fabuleuse :
"Je cherche : "Le dernier jour d'un survivant de Victor Hugo"
Cela va donner un léger sursis à ce pauvre condamné.
Pour terminer, cette dernière assez formidable :
"Je veux le livre de la femme du père Goriot"
Il m'a fallut pas mal de temps pour comprendre qu'il s'agissait (vraisemblablement) de Madame Bovary.